Repenser nos déplacements pour une ville plus saine
La mobilité est au cœur du fonctionnement et de la qualité de vie d’une métropole comme Montréal. Cependant, le modèle de déplacement actuel, encore largement dominé par l’automobile individuelle, pose des défis majeurs en termes de congestion, de pollution atmosphérique, d’émissions de gaz à effet de serre, de santé publique et d’équité sociale. Face à l’urgence climatique et à la nécessité d’améliorer le cadre de vie urbain, la transition vers une mobilité durable est devenue une priorité incontournable. Cette étude analyse les principaux enjeux, les stratégies mises en œuvre et les perspectives d’avenir pour la mobilité durable à Montréal en 2025, alors que la ville prépare son important Plan d’urbanisme et de mobilité (PUM) 2050.
L’impératif de la mobilité durable
La mobilité durable vise à offrir à tous des options de déplacement efficaces, sécuritaires, abordables et respectueuses de l’environnement. Ses bénéfices sont multiples :
- Environnementaux : Réduction des émissions de GES, amélioration de la qualité de l’air, diminution de la pollution sonore.
- Économiques : Réduction des coûts liés à la congestion (temps perdu, carburant), optimisation des infrastructures, développement économique lié aux nouvelles mobilités (transport collectif, vélo, etc.). La Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) souligne que la mobilité durable contribue stratégiquement au développement économique régional.
- Sociaux : Amélioration de la santé publique (activité physique, moins de pollution), accessibilité accrue pour tous (indépendamment du revenu ou des capacités physiques), renforcement du lien social dans des espaces publics plus conviviaux.
- Urbanistiques : Récupération de l’espace public dédié à l’automobile pour d’autres usages (espaces verts, terrasses, logements), création de quartiers plus agréables à vivre.
État des lieux et défis majeurs à Montréal
Malgré des progrès notables ces dernières années, Montréal fait face à des défis importants pour accélérer sa transition vers une mobilité durable.
1. La dépendance à l’automobile solo
L’automobile individuelle reste le mode de transport dominant pour de nombreux déplacements, notamment en périphérie et pour les trajets domicile-travail inter-arrondissements. Cette dépendance engendre une congestion chronique sur les axes routiers majeurs, avec les coûts économiques et environnementaux associés.
2. Le financement et la performance du transport collectif
Le réseau de transport collectif (métro, bus, REM) est l’épine dorsale de la mobilité durable. Cependant, il fait face à des enjeux cruciaux de financement pérenne pour assurer son entretien, sa modernisation et son développement. La CMM et l’Alliance TRANSIT soulignent l’importance d’investissements massifs et prévisibles. La fiabilité, la fréquence et la couverture du réseau, notamment en dehors des heures de pointe et dans les secteurs moins denses, restent des défis pour attirer davantage d’usagers. La mise aux normes et le maintien des actifs du métro sont des priorités pour la Ville de Montréal dans ses demandes budgétaires au gouvernement provincial.
3. Le développement et la sécurisation des transports actifs
La marche et le vélo gagnent en popularité, mais le développement d’infrastructures sécuritaires et continues (trottoirs larges, pistes cyclables protégées comme le REV, traversées piétonnes sécurisées) reste inégal sur le territoire. Assurer la sécurité des usagers les plus vulnérables est essentiel pour encourager l’adoption de ces modes actifs. Les plans de mobilité locaux, comme celui d’Outremont, mettent l’accent sur l’apaisement de la circulation et le développement du réseau cyclable.
4. L’électrification des transports
La transition vers les véhicules électriques est en cours, mais elle soulève des questions d’infrastructures de recharge, de coût d’acquisition et d’impact sur le réseau électrique. L’électrification complète du parc d’autobus de la Société de transport de Montréal (STM), un objectif clé de son Plan de développement durable 2025 (PDD 2025), représente un investissement majeur.
5. L’intégration intermodale
Faciliter le passage d’un mode de transport à l’autre (ex: vélo vers métro, REM vers bus) est crucial pour offrir des parcours fluides et attractifs. Cela nécessite une meilleure coordination entre les différents opérateurs (STM, REM, exo), une tarification intégrée et des infrastructures adaptées (stationnements vélo sécurisés, pôles d’échange efficaces).
6. L’équité et l’accessibilité
La mobilité durable doit être accessible à tous, quels que soient les revenus, l’âge, la condition physique ou le lieu de résidence. Cela implique de garantir des tarifs abordables pour le transport collectif, d’assurer l’accessibilité universelle des infrastructures et de desservir adéquatement les quartiers moins favorisés ou excentrés.
Stratégies et initiatives en cours
Face à ces enjeux, Montréal déploie plusieurs stratégies et initiatives pour promouvoir la mobilité durable.
1. Planification intégrée : Le PUM 2050
La Ville de Montréal prépare activement son Plan d’urbanisme et de mobilité (PUM) 2050, qui sera adopté en 2025. Ce plan vise à intégrer les décisions en matière d’aménagement du territoire et de transport pour créer une ville plus durable, résiliente et équitable. Il définira les grandes orientations pour les décennies à venir en matière de développement urbain, de réseaux de transport collectif et actif, et de gestion de la mobilité.
2. Le rôle de l’Agence de mobilité durable
Créée en 2020, l’Agence de mobilité durable de Montréal a pour mission de gérer le stationnement sur rue et hors rue, d’appliquer la réglementation et de contribuer au développement de la mobilité durable, notamment en favorisant le partage de l’espace public et en soutenant les alternatives à l’auto solo.
3. Le Plan de développement durable 2025 de la STM
La STM s’est dotée d’un plan ambitieux (PDD 2025) qui vise, entre autres, l’électrification complète de son réseau d’autobus, l’amélioration de l’expérience client, l’optimisation du service et la contribution à la réduction des GES. C’est un levier majeur pour renforcer l’attractivité du transport collectif.
4. Expansion des réseaux structurants
Le déploiement progressif du Réseau express métropolitain (REM) transforme la mobilité régionale. Parallèlement, des projets d’extension du métro (ligne bleue) et d’amélioration du réseau de bus sont en cours ou à l’étude.
5. Développement du réseau cyclable
La Ville poursuit l’expansion de son réseau cyclable, notamment avec le Réseau express vélo (REV), visant à offrir des axes protégés et efficaces pour les déplacements à vélo toute l’année.
6. Soutien aux mobilités partagées
Les services d’autopartage (Communauto), de vélopartage (BIXI) et de trottinettes électriques en libre-service (avec un encadrement réglementaire) complètent l’offre de mobilité et offrent des alternatives flexibles à la possession d’une voiture.
Perspectives d’avenir : Vers une mobilité repensée
La transition vers une mobilité durable à Montréal est un processus complexe et de longue haleine, qui nécessite une vision claire, des investissements soutenus et une collaboration entre tous les acteurs (gouvernements, opérateurs de transport, entreprises, citoyens).
Le succès de cette transition dépendra de la capacité de la ville à :
- Prioriser les investissements dans les infrastructures de transport collectif et actif.
- Mettre en place des politiques incitatives (tarification kilométrique, péages urbains, gestion du stationnement) pour décourager l’usage de l’auto solo.
- Intégrer la mobilité dans l’aménagement urbain pour créer des quartiers complets où les déplacements actifs et collectifs sont facilités (concept de la
ville des 15 minutes »).
- Innover dans les technologies et les services de mobilité (véhicules autonomes partagés, logistique urbaine optimisée, MaaS – Mobility as a Service).
- Sensibiliser et accompagner les citoyens dans le changement des habitudes de déplacement.
Un chantier collectif pour une mobilité réinventée
La mobilité durable n’est pas une simple option, mais une nécessité pour l’avenir de Montréal. Les enjeux sont complexes et les défis nombreux, mais la volonté politique affichée, notamment à travers la préparation du PUM 2050, et les initiatives déjà en cours témoignent d’une prise de conscience collective.
L’année 2025 est une année charnière, avec l’adoption attendue du PUM et la poursuite de projets structurants comme le REM et l’électrification du réseau de bus. Le succès de cette transition reposera sur une approche intégrée, des investissements conséquents et l’engagement de tous les acteurs. Réinventer la mobilité à Montréal est un chantier collectif essentiel pour bâtir une métropole plus résiliente, plus équitable et plus agréable à vivre pour les générations actuelles et futures.






